Bien-Etre VS Bonheur au travail

Aie aie aie, mes oreilles sont encore échauffées par ce que j’ai entendu récemment lors d’une conférence intitulée «Qualité & Santé au travail ». Pourtant tout avait bien commencé. Les deux premiers intervenants ont évoqué avec une assez bonne vision les concepts de Qualité de vie au travail et de Bien-être au travail. Et puis tout a dérapé au moment du débat. Le « Bonheur au travail » a fait son apparition…

Au commencement il y a 3 définitions

Commençons par une incursion dans le Larousse:

  • « Qualité de vie : tout ce qui contribue à créer des conditions propres à épanouir davantage l’individu ; ces conditions elles-mêmes » 

La qualité de vie au travail est une perception, liée à des conditions extérieures. Elle est du ressort de l’entreprise.

  • « Bien-être : état agréable résultant de la satisfaction des besoins du corps et du calme de l’esprit » 

Le Bien-être au travail renvoie aux attentes de l’individu en termes de santé ou de confort : c’est donc une notion qui dépasse la sphère strictement professionnelle.

  • « Bonheur : bonne chance, circonstance favorable ; état de complète satisfaction ; joie, plaisir liés à une circonstance » 

Le Bonheur au travail… n’existe pas. Peut-on sérieusement associer le « bonheur » au « travail » ? Comment le bonheur peut-il relever de la responsabilité des entreprises ? Doit-il être corrélé à sa performance économique ?

Un placebo pour masquer le mal-être au travail

Vous en avez assez d’entendre qu’installer une salle de sieste ou une table de ping-pong relève de la qualité de vie au travail ? Comme je vous comprends ! Car ces initiatives touchent plutôt à leur « bien-être », et peuvent parfois relever de l’appropriation ponctuelle d’un effet de mode.

Si certaines actions, comme les fameux cours de yoga à midi, peuvent être source de bien-être pour les collaborateurs, il est important de rappeler qu’elles ne sont pas obligatoires pour l’employeur, et qu’elles s’appliquent à améliorer (souvent ponctuellement) un état individuel. Elles peuvent venir consolider une stratégie d’amélioration de la qualité de vie au travail, mais n’en sont pas la colonne vertébrale car elles ne relèvent pas de l’organisation du travail à proprement parler.    

Halte à l’idéologie du « Bonheurisme »

Dans leur ouvrage « La Comédie (in)humaine » Nicolas Bouzou et Julia de Funès fustige la notion de Bonheur au travail. « Faisons tout pour que les salariés trouvent du sens et s’accomplissent dans leur travail, ils se sentiront d’autant plus joyeux. Le travail doit pouvoir être une cause de joie. Si cela contribue au bonheur, tant mieux. Soutenir à l’inverse que le bonheur constitue une condition pour bien travailler relève d’une tyrannie inefficace. Nous constatons malheureusement que, trop souvent, le baby-foot, les plantes vertes et la méditation express du midi se substituent au projet, au travail et au sens.

Le bonheur serait alors une notion instrumentalisée dans un but économique, or le bonheur doit impérativement être une affaire privée. »

Un cache misère pour masquer les vrais problèmes

Le risque est ici de masquer de vrais problèmes organisationnels ou managériaux par des solutions très visibles mais superficielles, et non par une transformation culturelle fondamentale.

As-t-on jamais vu un salarié faire un burn out parce qu’il n’y avait pas de flipper dans son espace de travail ?

C’est également l’avis de Thomas Chardin (Parlons RH) et Séverine Loureiro (Agence « Points de contact »).

Pour ces deux experts, outre le fait que « le bonheur est un état personnel et individuel », qui n’est « pas permanent ni continu », le bonheur au travail est une injonction paradoxale qui nuit à l’état du salarié plus qu’il ne l’améliore. Ils affirment : « L’axe de travail sur le bien-être (et non le bonheur) des salariés en entreprise existe déjà. Il existe même depuis un moment : c’est la Qualité de Vie au Travail.

Et c’est un sujet RH par excellence que la fonction doit investir dans son ensemble. Alors oui, « Chief QVT Officer », ça sonne moins bien que « Chief Happiness Officer », mais c’est pourtant le bon titre pour la finalité recherchée : faire en sorte que le collaborateur travaille dans de bonnes conditions (physiques, matérielles, organisationnelles) et se sente bien dans son poste/entreprise. »

Soyons raisonnable

Le bonheur au travail est une promesse paradoxale que l’entreprise ne pourra jamais tenir. Le bien-être au travail reste ponctuel et axé sur le confort de l’individu.

La qualité de vie au travail, en revanche, est un élément structurant de la stratégie RH de beaucoup d’entreprises, qui ne peuvent désormais plus transiger.

Pour qu’elle soit durable, la transformation culturelle doit être engagée par toutes les parties prenantes, et être enclenchée par un management courageux et volontaire. C’est aujourd’hui une nécessité, car il n’est plus possible de faire marche arrière face à l’évolution des attentes des salariés.

Alors amis Dirigeants, faites un effort ne confondez pas réelle stratégie managériale et poudre de perlimpimpim.

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